5 minutes pour comprendre les Stablecoins hybrides avec Frax V1

Alexandre Kahn
6 min readNov 26, 2021

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Cet article cible un public ayant déjà des connaissances sur les cryptomonnaies. Le protocole V1 est désormais périmé mais permet de comprendre les concepts derrière le protocole FRAX. L‘article sur la version V2 est disponible ICI.

Les stablecoins sont des cryptomonnaies indexées sur une monnaie fiduciaire comme le dollar ou des actifs comme l’or. Ils sont une source importante d’innovation dans l’écosystème des cryptomonnaies et notamment celui de la DeFi. Nous verrons en quoi Frax se détache des familles de protocoles existants et comment fonctionne sa V1.

1/ Les protocoles stablecoins ajourd’hui

Aujourd’hui, on peut distinguer trois grandes familles de protocoles stablecoin :

  • Les protocoles collatéralisés centralisés :

Un tiers de confiance assure que le montant total des stablecoins en circulation correspond au montant total de la réserve de la monnaie fiduciaire équivalente. On peut citer des projets comme l’USDT de Tether ou l’USDC de Circle. Le risque inhérent à ces projets est le “Custody Risk” puisque les projets ont le contrôle des fonds de la réserve. De plus, le modèle d’intermédiation est contradictoire avec la décentralisation, principe idéologique et économique de la blockchain.

  • Les protocoles décentralisés surcollatéralisés :

Un protocole décentralisé émet un stablecoin au prorata d’une réserve composée de plusieurs cryptomonnaies stables ou volatiles. Le taux de collatéralisation est supérieur à 100% afin de diminuer les risques de liquidation si la valeur des cryptomonnaies en réserve diminue. On peut par exemple citer le DAI. Ces modèles assurent un niveau élevé de décentralisation mais perd en efficience économique par la surcollatéralisation de la réserve.

  • Les protocoles algorithmiques :

Ils ne sont pas fondés sur un collatéral mais sur des procédés algorithmiques censés stabiliser la monnaie. On peut citer Basis ou Empty Set Dollar. Ces modèles sont “trustless” et efficients économiquement mais non fonctionnels en pratique. Aucun stablecoin algorithmique n’a pour l’instant réussi à assurer une stabilité des prix sur le court ou long terme.

2/ Frax, un modèle hybride

Frax se présente comme un modèle hybride qui s’inscrit sur un spectre entre le modèle algorithmique et le modèle collatéralisé.

Les objectifs sont de garantir:

  • Une efficience économique par la sous-collatéralisation
  • Un modèle trustless sans “Custodial Risk”
  • Une grande scalabilité
  • Une gouvernance de protocole décentralisée

Ce protocole est composé d’un taux collatéralisé de x% et d’un taux algorithmique de 1-x%. Le protocole est 100% collatéralisé au lancement, puis la part algorithmique s’accroît quand le niveau de confiance dans le protocole progresse.

Il est composé de deux tokens : le FRAX qui est le stablecoin indexé sur le dollar, et le FXS qui est le token utilitaire du protocole et qui est volatile. La réserve en collatéral est composés de plusieurs stablecoins comme l’USDC. Le protocole acceptera, à terme, des cryptomonnaies volatiles en collatéral.

Ainsi, pour chaque FRAX en circulation, il y a une part collatéralisée en USDC (par simplification nous considérons l’USDC comme collatéral unique) et une part algorithmique en FXS.

Pour créer des FRAX, l’utilisateur envoie un certain montant d’USDC et un certain montant de FXS définis par le taux de collatéralisation. Les FXS envoyés sont “brûlés”, c’est à dire retirer de la quantité en circulation.

Pour retirer des FRAX de la circulation, l’utilisateur envoie des FRAX sur le protocole et reçoit en échange un certain montant d’USDC de la réserve et un certains montant de FXS émis par le processus de “mint”, c’est à dire créés et ajoutés à la circulation.

Schéma 1 : Mécanisme de “Minting” et “Redeeming” (Source : Whitepaper)

3/ Les mécanismes de stabilisation du prix

La stabilité du prix à son “peg” s’appuie sur de simples mécanismes économiques d’arbitrage. Les schémas suivants permettent de comprendre les mécanismes de stabilisation quand le prix du FRAX varie.

Le prix du FRAX augmente:

Schéma 2: Mécanisme de stabilisation du prix suite à un choc de demande positif

(Le schéma est disponible ICI pour les versions mobiles. Les schémas sont en version anglophone simplifiée)

Le prix du FRAX diminue:

Schéma 3: Mécanisme de stabilisation du prix suite à un choc de demande négatif

(Le schéma est disponible ICI pour les versions mobiles.)

4/ Le Market Cap du FRAX et le mécanisme déflationniste du FXS

On peut inférer des schémas précédents que le Market Cap du FRAX varie avec celui de son prix. Le schéma suivant permet de mieux visualiser le lien entre mécanismes de stabilisation et Market Cap:

Schéma 4: Relation entre prix et Market Cap (Source: Whitepaper)

On suppose un équilibre initial (p0;q0) soit p0=1$ et q0=100 avec la surface bleue qui représente le Market Cap total.

Si le prix du FRAX augmente, on a p1=1,1$. Il y a donc une situation de déséquilibre, des FRAX sont alors émis par les “arbitrageurs”. (schéma 2)

On a donc une hausse de la quantité du FRAX et une diminution du prix, soit un nouvel équilibre (p0;q1) avec les surfaces bleues et vertes qui représentent le Market Cap total.

Il est intéressant de noter que la surface hachurée représente la quantité de FXS brûlés pour atteindre le nouvel équilibre. Donc plus le Market Cap du FRAX augmente, plus la quantité de FXS en circulation diminue. Le FXS suit donc un mécanisme déflationniste, ce qui le rend très pertinent en termes de “Tokenomics”.

5/ Le taux de collatéralisation

Les tokens que l’on peut échanger lors des processus de “mint” ou de “redeem” dépendent du taux de collatéralisation. Par exemple, avec un taux de 80%:

Si un utilisateur “mint” le token alors il doit envoyer 80$ d’USDC et 20$ de FXS pour obtenir 100 FRAX. Les 20$ de FXS sont brûlés donc seuls 80$ entre dans la réserve. On a bien 100 FRAX créés pour 80$ soit 80% de collatéral.

Si un utilisateur “redeem” le token alors il envoie 100 FRAX et récupère 80$ d’USDC ainsi que 20$ de FXS émis. On a bien 100 FRAX brûlés pour 80$ d’USDC dans la réserve soit 80% de collatéral.

Dans la version V1.0:

Le taux de collatéralisation évolue à l’inverse du Market Cap du FRAX. Quand le Market Cap est croissant, le taux de collatéralisation diminue de 0,25% par heure et réciproquement. Par exemple si le collatéral est de 50% et que le Market Cap du FRAX est croissant pendant 3 heures, alors le taux de collatéralisation sera de 49,25%. Ainsi, le protocole considère qu’une hausse du Market Cap est un signe de confiance, la part algorithmique peut donc croître.

Dans la version V1.1:

Le taux de collatéralisation dépend de l’évolution du Market Cap du FRAX et de la quantité totale en $ de FXS utilisés en Liquidity Providing sur les DEX, soit :

Gr = S(FXS) / S(FRAX)

avec Gr = Growth ratio,

S(FXS) = Supply totale en $ de FXS en LP,

S(FRAX) = Supply totale en $ de FRAX

Si le prix du FXS augmente → le Market Cap augmente → S(FXS) augmente → le slippage sur les DEX diminue

Puisqu’on a un Market Cap croissant et une diminution du slippage, on peut alors augmenter la part des FXS dans le taux de collatéralisation sans craindre d’effets sur la volatilité du FXS.

A l’inverse, si le prix du FXS diminue, la part du FXS dans le taux de collatéralisation diminue, donc moins de FXS sont brûlés ou émis, ce qui tend à diminuer sa volatilité.

Le “Buyback” et la recollatéralisation

Si le taux de collatéralisation évolue, alors il y a un déséquilibre dans la réserve entre le montant de collatéral attendu et le montant de collatéral réel. Là encore, un mécanisme d’arbitrage permet de revenir à l’équilibre:

Schéma 5 : Mécanisme de recollatéralisation

(Le schéma est disponible ICI pour les versions mobiles.)

Conclusion

Le mécanisme hybride du FRAX est pertinent car il permet d’introduire une part algorithmique croissante au fur et à mesure de la preuve de résilience du protocole.

La version V2 introduit le concept d’un “contrôleur algorithmique d’opération de marché” (Algorithmic Market Operations Controller). Il permet de stabiliser le prix, faire varier le taux de collatéralisation et d’effectuer des opérations de marché dans divers protocoles DeFi.

Disclaimer : Aucun contenu dans cet article n’est un conseil en investissement ou une incitation à investir. L’auteur de l’article n’a pas de partenariat avec les projets présentés.

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Alexandre Kahn
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Written by Alexandre Kahn

Blockchain Analyst & Project Manager | Specialist in Digital Economy | Crypto Investor

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